Les travailleurs chinois en France ds la 1° Guerre mondiale

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Les travailleurs chinois en France ds la 1° Guerre mondiale

Messagepar laoshi » 27 Déc 2013, 11:23

ZhenZooNaiCha me signale deux articles du Monde intitulés Les travailleurs chinois de la première guerre mondiale, comme le livre publié sous la direction de Ma Li dont ils rendent compte. Voici la présentation du livre par le CNRS :

L'éditeur a écrit:
Cent quarante mille Chinois ont travaillé en France pendant la Première Guerre mondiale. Cette histoire est restée longtemps méconnue du public. Que faisaient-ils dans cette « guerre européenne » ? Comment ont-ils été recrutés et transportés ? Où se trouvaient-ils, et pour quoi faire ? Que sont-ils devenus ? Quel est héritage de cette expérience ? L’ensemble de ces questions, par leurs multiples ramifications, touche non seulement à l’histoire de la Grande Guerre, mais aussi à l’histoire de la Chine. Cet épisode s’inscrit dans une période décisive de l’histoire mondiale : la Conférence de paix de Paris a déclenché le « Mouvement du 4 mai » (1919), soulèvement patriotique, considéré comme l’acte de naissance de la modernité chinoise.

Cet ouvrage, le premier en langue française qui fait œuvre de synthèse, réunit les recherches les plus récentes sur le sujet, en s’appuyant sur des documents originaux, archives et sources primaires chinoises, et en pré- sentant des témoignages inédits.

L'auteur :

Li Ma est maître de conférences à l’Université du Littoral Côte d’Opale. Historienne et sinologue, ses publications portent sur l’histoire et la philosophie politique, sur le développement économique de la Chine, ainsi que sur la Grande Guerre et les travailleurs chinois. Elle a notamment publié l’ouvrage Pouvoir et philosophie chez Zhu Yuanzhang ; despotisme et légitimité (2002).

Des chercheurs de neuf pays, et des spécialistes de l’histoire des travailleurs chinois et de la Grande Guerre, issus de différentes disciplines (histoire, sinologie, linguistique, japonologie, science politique, archéologie et anthropologie, littérature comparée, droit et économie, ainsi que des spécialistes de muséographie), ont contribué à cet ouvrage.

Jolvil nous avait déjà parlé de sa découverte du cimetière de Noyelles-sur-mer et révélé ainsi un pan inconnu de notre histoire.

Près de 37 000 Chinois, en majorité originaires de la province du Shandong, recrutés sous contrat, ont travaillé dans l'industrie et dans l'agriculture pour remplacer les hommes envoyés au front mais ils ont aussi été employés dans les usines d'armement françaises et ce, en violation de leur contrat qui stipulait qu'ils "ne devaient s'acquitter d'aucune tâche militaire". Entre 93 000 et 100 000 furent embauchés par les Britanniques qui les utilisèrent pour le déminage, l'acheminement des équipements militaires, et, après la guerre, pour le nettoyage des champs de bataille, ce qui, là encore, était contraire à leur contrat. Les Français semblent les avoir mieux traités que les Anglais (le salaire était de base était de 1F 50 par jour et allait jusqu'à 6 F par jour pour les travailleurs qualifiés en France contre 1F et 1F 50 en Angleterre) même s'ils étaient regroupés dans des camps de travailleurs et qu'ils n'avaient pas le droit de se mêler à la popultion locale. Malgré la présence d'environ 150 interprètes, la barrière de la langue compliquait les relations entre employés et employeurs. « L'écrasante majorité ne comprenait pas les ordres donnés, explique Ma Li. Pour que les ouvriers se pressent, les officiers anglais hurlaient "Go ! Go !", ce qui en mandarin veut dire "chien ! chien ! ". » Grèves et incidents de toute sorte s'ensuivirent.

Malgré la pression des autorités françaises pour que les travailleurs chinois retournent dans leur pays après la guerre, entre 2000 et 3000 restèrent en France, les plus politisés parce que la France était le pays de la Révolution, qu'ils admiraient, mais la plupart étaient analphabètes et les jeunes intellectuels qui, tel Zhou Enlai, vinrent étudier en France dans le cadre du mouvement Travail-Etudes, n'eurent guère d'influence sur eux. La plupart étaient originaires du Zhejiang (au sud de la Chine), et, en particulier de Qingtian et de Wenzhou, et s'installèrent près de la gare de Lyon, dans l'îlot de Chalon (rasé dans les années 70, ce qui détermina leur migration vers Belleville et vers la banlieue), ils se firent marchands forains avant de devenir ébénistes à Richard Lenoir puis travailleurs du textile au Sentier et dans le quartier des Arts et Métiers où ils remplacèrent les Juifs déportés. Leur intégration se fit, pour une grande partie d'entre eux, par le mariage avec des Françaises. Une plaque commémorative fut installée près de la gare de Lyon en 1988 et une stèle « à la mémoire des travailleurs et des combattants chinois morts pour la France » fut érigée, la même année, dans le jardin Baudricourt, à Paris dans le 13e arrondissement.
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Re: Les travailleurs chinois en France ds la 1° Guerre mondi

Messagepar mandarine » 27 Déc 2013, 15:33

Merci ZhenZooNaiCha .

Voici la seconde partie :

Image




La plaque commémorative des travailleurs chinois de la première guerre mondiale fut inaugurée le 11 novembre 1988 rue Chrétien de Troyes, près de la gare de Lyon à Paris.

Que sont devenus les travailleurs chinois après la signature de l’armistice du 11 novembre 1918 ? La plupart des Chinois recrutés par les Britanniques sont restés jusqu’en 1920. C’est le cas de ceux qui avaient été recrutés en 1917 pour un contrat de trois ans. « Ils ont servi pour la reconstruction et le nettoyage des champs de bataille dans l’Artois et à Ypres dans les Flandres », précise Ma Li, auteure des Travailleurs chinois dans la première guerre mondiale (2012). Parmi les Chinois employés par la France, les derniers sont repartis en 1922. Fortement invités par les autorités françaises à rentrer chez eux, une petite minorité décide de rester. Emmanuel Ma Mung, géographe, spécialiste des migrations chinoises, estime qu’ils furent entre 2000 et 3000 Chinois à s’installer à Paris, en banlieue et dans certaines grandes villes de province. « Ces personnes venaient tous de la province de Zhejiang au sud de la Chine, notamment de la petite ville de Qingtian et de Wenzhou, explique-t-il. Ils ont retrouvé à Paris, des personnes originaires de la même province, déjà installées en France avant la Première guerre mondiale. Il y avait dans cette région une tradition migratoire ancienne, celle des colporteurs de Qingtian, qui traversaient la Chine et la Russie pour vendre des objets de pierres et des statuettes ».

A Paris, ces Chinois se retrouvent à l’îlot Chalon, près de la gare de Lyon. « Il y avait dans ce quartier des cantines chinoises qui étaient devenuus des petits centres consulaires, indique Marie Holzman, sinologue, auteur de Chinois de Paris (1989). Un point de rencontre pratique pour ces hommes débarqués en bateau à Marseille qui arrivaient en train à la gare de Lyon. « Il faut garder à l’esprit qu’ils n’étaient jamais sortis de leur village et qu’ils ne parlaient pas un mot de français ni même de mandarin », rappelle Marie Holzman. Selon Ma Li, 80% des travailleurs chinois venus travailler en France étaient illettrés. Après la guerre, la plupart deviennent colporteurs. « Comme ceux qui étaient là avant, ils vendaient sur les marchés des produits de maroquinerie », ajoute Emmanuel Ma Mung. A partir du milieu des années 1920, les Chinois s’installent également dans d’autres quartiers. A Richard-Lenoir, ils travaillent dans l’ébénisterie. Dans le Sentier et aux Arts-et-Métiers, ils sont embauchés dans des ateliers de textile tenus par les Juifs. Petit à petit, les Chinois rachètent ces ateliers. « L’expansion des Chinois dans le quartier des Arts-et-Métiers date véritablement de la seconde guerre mondiale, précise Marie Holzman. Beaucoup de Juifs ont alors été déportés par les Allemands. Dès qu'un atelier était vide, les Chinois s'installaient ».

Dans quelle mesure ces immigrés chinois s’intègrent-ils dans la société française de l’époque ? « Ils se sont intégrés économiquement, mais il ne faut pas oublier qu’en arrivant en France, ils n’avaient jamais vu une école de leur vie. Il est très difficile de saisir leur vision du monde », déclare Emmanuel Ma Mung. Selon Ma Li, l’intégration se fait notamment par le mariage. Nombre des Chinois épousent des Françaises, souvent des migrantes venues d'Alsace, de Normandie et de Bretagne. Une petite partie d’entre eux sont politisés et syndicalisés, en particulier, ceux qui ont travaillé dans les usines françaises. Comme pour beaucoup de Chinois de l’époque, leur conscience politique naît pendant la Conférence de paix de Paris. La Chine, qui se trouvait dans le camp des vainqueurs de la guerre parce qu’elle avait pourvu les Alliés en main d’œuvre, assiste impuissante au transfert de la province du Shandong au nord de la Chine (détenue par les Allemands) au Japon. « Or, la grande majorité des travailleurs chinois venaient du Shandong. Pour eux, c’était une humiliation, insiste Ma Li. C’est à cause d’eux qu’est né le mouvement du 4 mai 1919, qui voit plus de 3000 étudiants se réunir devant la place Tiananmen, pour manifester contre le traité ».

Selon l’historienne, les travailleurs chinois découvrent les idées marxistes et anarchistes au contact des milliers de jeunes concitoyens venus étudier en France dans les années 1920, tels Zhou Enlai (premier ministre chinois de 1949 à 1976) et Deng Xiaoping (président de facto de la Chine de 1978 à 1992). Entre la fin de la guerre et 1927, 4000 jeunes chinois avaient fréquenté les universités françaises dans le cadre du mouvement Travail-Etudes, créé par le Chinois Li Shizeng, philanthrope et admirateur de la culture française. « Ces Chinois sont d'autant plus sensibles au discours communiste dans les années 1920 qu'ils sont venus ou restés parce que la France est le pays de la Révolution, explique Marie Holzman. 1789 exerce une très grande fascination sur eux. Le pôle d'attraction n'était pas encore l'URSS qui émergeait à peine de sa révolution. A l'époque, on allait faire ses études à Paris ». Pour Emmanuel Ma Mung, l’influence de ces étudiants est à relativiser : « D’après les témoignages recueillis, les intellectuels comme Zhou Enlai venaient manger dans les cantines de l'îlot Chalon, ils y rencontraient ces Chinois d’extraction très populaire. Leur but était de les éduquer, mais ils n’ont pas été très suivis, parce que la différence sociale était trop énorme ».

Lorsque l'îlot Chalon est rasé dans les années 1970, beaucoup de Chinois s'installent à Cormeilles-en-Parisis (Val d'Oise), mais aussi dans les quartiers parisiens des Arts-et-Métiers et de Belleville. Au sein des familles immigrées chinoises, la mémoire des travailleurs de la première guerre mondiale s'est peu à peu éteinte. « On sait qu'un grand oncle est venu travailler pendant la guerre, mais cette mémoire est restée cantonnée dans les familles, explique Emmanuel Ma Mung. Il n'y a pas eu de travail de mémoire collectif ». L'une des seules démarches a été tuée dans l'oeuf : l'Association générale des travailleurs chinois en France avait demandé dans les années 1920 que leurs concitoyens morts pendant la première guerre mondiale soient enterrés dans un cimetière, mais cette demande fut rejetée par les autorités françaises, pour des raisons budgétaires. Ce n'est que le 11 novembre 1988, qu'une plaque commémorative est apposée près de la gare de Lyon à Paris (Voir photo). Elle est inaugurée par Paul Quilès, député, membre du Conseil de Paris et ancien ministre de la Défense. Une stèle « à la mémoire des travailleurs et des combattants chinois morts pour la France » est ensuite érigée en 1998 dans le jardin Baudricourt, à Paris dans le 13e arrondissement. Dernier geste de reconnaissance en date de la part de l'Etat français envers ces travailleurs chinois : le financement par le ministère de la défense d'un important travail de recherche sous la direction de l'historienne Ma Li, en 2012



http://lagrandeguerre.blog.lemonde.fr/2 ... ndiale-22/
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Cimetière chinois de Nolette

Messagepar mandarine » 29 Fév 2016, 13:40

J'ai été très surprise et heureuse de découvrir ce cimetière chinois hier sur ma route en me rendant au Crotoy .
Je ne joins pas mes photos personnelles étant toujours fâchée avec dropbox...
Wikipédia nous les propose.


Le cimetière chinois de Nolette est un cimetière situé le territoire de la commune française de Noyelles-sur-Mer où sont inhumés les travailleurs civils chinois employés par l'armée britannique pendant la Première Guerre mondiale.

Il s'agit du plus grand cimetière chinois de France et d'Europe.

Pendant la Première Guerre mondiale, Noyelles abrita une importante base arrière britannique dont un grand camp de coolies (travailleurs immigrés chinois). Ils furent recrutés par l'armée britannique entre 1917 et 1919 dans le cadre du corps de travailleurs chinois (en anglais, Chinese Labour Corps), pour des tâches de manutention à l'arrière du front mais certains connaitront les zones de combat.

Ils représentent l'une des premières immigrations chinoises en France. Ils avaient l'interdiction de se mêler à la population civile du lieu. Certains resteront en France après la Grande Guerre.
Chinois en France Image


Ils étaient affectés à des tâches pénibles et dangereuses comme le terrassement de tranchées, le ramassage des soldats morts sur le champ de bataille, le déminage des terrains reconquis, la blanchisserie, les services de santé auprès des malades, en particulier ceux atteints de la grippe espagnole...

En 1921, le gouvernement britannique décida l'édification du cimetière chinois à Nolette. Le Major Truelove est chargé de sa réalisation sous l'autorité d'Edwin Lutyens.

Depuis 2002, le cimetière de Nolette est le lieu de célébration de la Fête de Qing Ming (Fête des Morts chinoise) en France organisée par le Conseil pour l'intégration des communautés d'origine chinoise en France.

On trouve dans le département de la Somme des tombes de coolies dans les cimetières d'Abbeville, Albert, Daours, Gézaincourt, Tincourt-Boucly et Villers-Carbonnel.
Caractéristiques
Une des deux statues de lion.Image

Propriété de l'État français et gérée par la Commonwealth War Graves Commission, la nécropole située près du hameau de Nolette dans la commune de Noyelles-sur-Mer a été inaugurée en 1921 par le Préfet de la Somme. 849 travailleurs chinois sont inhumés à Noyelles-sur-Mer. La plupart travaillait au camp chinois de l'armée britannique situé sur la commune entre 1917 et 1919.


Tombe de Yang Shiyue 楊十月 originaire du Shandong, mort le 12 janvier 1919. Image

Beaucoup sont morts d'une épidémie de choléra qui a sévi dans le camp, de la grippe espagnole en 1918-1919 ou de la tuberculose, voire tués dans les zones de combat.

Le site est caractérisée par le portail d'entrée, les inscriptions sur les tombes et les essences d'arbres (pins, cèdres...) qu'on ne rencontre pas dans les autres cimetières du Commonwealth ainsi que par l'absence de Croix du sacrifice et de pierre du souvenir.

Les tombes de ce cimetière sont constituées de 849 stèles en marbre blanc, avec sur chacune d'elle gravée une inscription en anglais « Faithful unto Death » ou « Though dead he still liveth » ou encore « A good reputation endures for ever » ainsi que des idéogrammes chinois et parfois, très rarement, le nom en anglais ou le matricule du défunt.

Le porche monumental et le mur de l'entrée tiennent lieu de mémorial pour la quarantaine de Chinois morts sur terre ou sur mer sans tombes connues. Image



https://fr.wikipedia.org/wiki/Cimeti%C3 ... de_Nolette
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Re: Les travailleurs chinois en France ds la 1° Guerre mondi

Messagepar laoshi » 02 Mars 2016, 18:26

Dommage pour les photos, Mandarine, mais vous pouvez ou bien les intégrer en pièces jointes (pour peu qu'elles ne soient pas trop lourdes) ou bien me les envoyer par mail, je me chargerai de les mettre dans le message.
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les photos de Mandarine

Messagepar laoshi » 22 Mars 2016, 13:40

Voilà les photos de Mandarine, il m'a fallu un peu de temps pour les redimensionner... et les mettre à l'endroit mais elles sont très émouvantes !

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Re: Les travailleurs chinois en France ds la 1° Guerre mondi

Messagepar mandarine » 01 Avr 2016, 10:16

Merci Laoshi pour avoir terminé la tâche .
Ce cimetière est en rase campagne , mais pas isolé du village que l'on aperçoit sur les photos.
C'est un endroit très paisible , très "zen" et qui convient bien à la culture de ces travailleurs que nous pouvons remercier et visiter quand l'occasion se présente.
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