Mao, L'histoire inconnue

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règlements de compte et manipulations en tous genres

Messagepar laoshi » 17 Oct 2011, 10:58

Zhang Guo-tao avait des comptes à régler avec Mao. Mao avait tout mis en œuvre pour annihiler son armée. Après l’avoir détournée d’une route sûre pour la jeter sur une voie semée d’embûches mortelles lors de la Longue Marche, il lui avait ordonné d’effectuer une percée à travers les troupes nationalistes qui barraient la route vers la Mongolie extérieure où devaient avoir lieu les livraisons d’armes soviétiques. 21 800 hommes étant restés coincés au-delà du Fleuve Jaune au cours de cette opération vouée à l’échec, Mao leur ordonna une nouvelle mission suicide : traverser les 1500 km de désert qui les séparait du Xinjiang lui aussi contrôlé par les Russes. Ce Contingent de l’Ouest devait « se battre jusqu’au dernier soldat et jusqu’à la dernière goutte de sang » : 400 hommes sur 21 800 survécurent à la résistance farouche des populations musulmanes ; dans le Gansu, 1000 furent enterrés vivants, les 2000 femmes du contingent furent violées, d’autres vendues comme esclaves… mais il n’avait pas suffi à Mao d’exterminer le Contingent de l’Ouest, il avait rendu Zhang Guo-tao responsable du désastre et il avait fait massacrer les rescapés :
un fonctionnaire de Yan’an a raconté : Quand ils sont arrivés, nous avons commencé par les accueillir à bras ouverts et nous leur avons pris leurs armes. Puis nous leur avons dit : « Camarades, vous avez subi bien des épreuves. Vous êtes transférés à l’arrière où vous pourrez vous reposer. » Nous les avons emmenés par fournées dans les vallées, tous ces petits-fils de tortue, et nous les avons enterrés vivants »
[...] Tout d’abord, nous leur avons doit avec un grand sourire : « Camarades, creusez donc les fosses, nous voulons enterrer vivants des soldats nationalistes. » Ils ont vraiment travaillé dur […]. Une fois qu’ils ont eu fini, nous les avons tous poussés dedans […]. Nous, on ne reconnaît que l’autorité du président Mao. Tout ce qu’il nous demande de faire, on le fait.

Pour faire bonne mesure, Mao avait infligé brimade sur brimade à Zhang Guo-tao : il l’avait fait expulser de chez lui pour s'installer à sa place et avait fait donner le rôle d’un traitre « trotskiste » à son fils dans une pièce de théâtre donnée par l’école. On comprend que Zhang Guo-tao ait voulu prendre sa revanche sur son adversaire. En décembre 1937, il s’était rangé, contre Mao, à la ligne de Wang Ming, « la guerre aux Japonais d’abord ». Au printemps 1938, il tenta même, mais en vain, de rallier les opposants à l’idée d’éliminer Mao. Devant l’échec de son entreprise, il passa dans le camp nationaliste. Il fut exclu du Parti et ses partisans de Yan’an furent liquidés : 200 d’entre eux furent enterrés vivants. Un bonheur ne venant jamais seul, les agents soviétiques qui accusaient Mao d’être un agent japonais furent exécutés, Mao avait désormais les coudées franches pour s’attaquer à Wang Ming…

Wang Ming avait été remplacé à Moscou par Wang Jia-xiang, « le prof rouge » ; Dimitrov, le chef du Komintern, lui ayant déclaré en juin 1938 dans une conversation à bâtons rompus que les communistes chinois devaient régler leurs problèmes « sous la direction ayant à sa tête Mao Zedong », Mao se servit de cette phrase comme d’un nouveau sésame. Alors que Wuhan était sous le feu des Japonais, il convoqua le plénum du Comité central à Yan’an pour lui faire entendre « les instructions du Komintern ». Wang Ming eut beau protester qu’il n’était guère opportun de quitter le champ de bataille, il dut se rendre à Yan’an. Le plénum se réunit le 29 septembre : Wang Jia-xiang répéta le propos de Dimitrov et Mao déclara aussitôt qu’il présenterait le rapport politique, en tant que « numéro un ». Le tour était joué !
Le propos de Dimitrov dont s’était revendiqué Mao visait l’unité du Parti. Qu’à cela ne tienne ! Pour discréditer ceux qui avaient eu le tort de voter contre lui, Mao utilisa l’un de ses stratagèmes favoris ; il fit traîner le plénum en longueur : près de deux mois ! Lorsque Zhou Enlai, Xiang Ying, Po Ku et Wang Ming, rappelés sur le théâtre des opérations, eurent quitté les lieux, Mao put imposer sa politique au plénum : bafouant ouvertement les consignes de Staline et revenant sur sa promesse de « braquer tous les fusils sur les Japonais », il désigna Tchang comme l’ennemi à abattre et fit de l’extension des bases rouges sa priorité. Liu Shaoqi approuvait cette stratégie de prise du pouvoir. Peng De-huai et Zhu-De, conscients que la guerre civile serait inévitable si les rouges cherchaient à élargir leurs bases, se laissèrent convaincre. Pour éviter que Moscou ne soit mis au courant de cette trahison, Mao interdit à quiconque de « révéler des secrets » fût-ce à l’intérieur du Parti : Wang Ming n’en saurait donc rien.

En juin 1939, Mao ne pouvait plus, néanmoins, cacher la réalité aux Russes : les bases rouges s’étaient multipliées, les combats avec les nationalistes faisaient rage. Pour désamorcer la colère du grand-frère soviétique, Mao prétendit qu’il s’agissait de « légitime défense » ; après s’être concilié les bonnes grâces de Moscou en chantant les louanges Staline dans un film de propagande, il envoya ses émissaires – parmi lesquels Lin Biao et Mao Ze-min -, chanter les siennes à Moscou et discréditer ses opposants, en particulier Wang Ming. Zhou Enlai, qui avait fini par se rallier à Mao, fut le troisième envoyé « extraordinaire » de Mao à Moscou : niant l’évidence, il certifia que le PCC suivait toujours la politique du « front uni » et fit l’éloge de Mao. Mao Ze-min n’en fit pas moins des réserves à ses interlocuteurs russes sur ses opinions « malsaines » à l’égard des nationalistes…
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Mao rêve d'un pacte japono-soviétique

Messagepar laoshi » 06 Déc 2011, 14:08

Le 23 août 1939, Staline conclut le pacte germano-soviétique avec Hitler ; l’URSS et l’Allemagne nazie envahirent la Pologne dont elles se partagèrent les dépouilles. Pour de nombreux communistes, y compris en Chine, c’était un terrible traumatisme. Chen Duxiu fustigea en Staline un « démon féroce », capable de transformer le bien en mal du jour au lendemain.

Un accord de cessez-le-feu entre le Kremlin et le Japon, au même moment, faisait craindre un scénario identique en Chine. Mais tandis que beaucoup s’inquiètaient, Mao se prenait à rêver : si Staline et Hirohito se partageaient la Chine comme Staline et Hitler s'étaient partagé la Pologne, il serait à coup sûr placé à la tête de la zone communiste ! Interrogé par Edgar Snow sur cette éventualité, il la trouva « tout à fait conforme aux possibilités du léninisme » ! Même enthousiasme après la partition de la France entre une zone occupée par les Allemands et l’autre gouvernée par le régime de Vichy : Mao se serait bien vu en Pétain stalinien…. La ligne de démarcation serait le Yangzi : « une moitié de la Chine serait alors sous notre autorité », disait-il à ses intimes.

Dès lors, Mao ne chercha plus à dissimuler ses agressions contre les armées de Tchang : dans la perspective d’un pacte entre l’URSS et le Japon, il était essentiel que les communistes étendent leur zone d’influence. Les chiffres que fournit Mao à Moscou témoignent de la violence des combats dans ce qui restait officiellement « le front uni » : dans le rapport qu’il envoya à Staline le 22 février 1940, Mao affirme avoir éliminé 6000 nationalistes dans le Hebei, 10 000 dans le Shanxi.

Dès septembre 1939, Mao entama une collaboration active avec les services secrets japonais, c'est là l'un des épisodes les plus méconnus de l'histoire du maoïsme :

un agent du service de renseignements du PCC a écrit:La tactique de notre Parti vis-à-vis des Japonais […] était : « Utilisez la main de l’ennemi pour frapper l’autre ennemi » […] l’annihilation par les Japonais de [l’armée clandestine des nationalistes] au sud du Yangzi [a été l’un des] chefs-d’œuvre de la coopération entre les Japonais et notre Parti.

Conformément à cette ligne collaborationniste, les communistes de la Nouvelle 4° armée conclurent un pacte secret avec les Japonais dans l’est de la Chine centrale : les rouges s’engageaient à ne par saboter les voix ferrées et les Japonais leur abandonnaient les campagnes. Pour Hirohito, l’ennemi à abattre était en effet Tchang, les communistes lui semblaient quantité négligeable et leur bienveillante neutralité était un atout majeur de la victoire japonaise.

Cependant, tous les communistes ne partageaient pas le point de vue de Mao. Certains plaçaient l'intérêt du pays avant celui du Parti et voyaient une priorité dans la lutte contre les Japonais. Au printemps 1940, alors que Zhu De et Peng De-huai voulaient attaquer les voies de transports des Japonais, Mao le leur interdit. Tchang ayant invité Zhu à Chongqing, sa nouvelle capitale, pour essayer de mettre un terme aux luttes fratricides des rouges et des nationalistes chinois, Mao s’arrangea pour le faire passer par Yan’an : Zhu y fut consigné jusqu’à la fin de la guerre ! A sa place, Mao délégua Zhou Enlai, son homme lige…

En mai 1940, tandis que les troupes au sol se dirigeaient vers la ville, les Japonais pilonnèrent Chongqing : les bombardements firent près de 10 000 victimes civiles. L’opinion, découragée, était de plus en plus favorable à un accord avec le Japon à la grande satisfaction de Mao qui voyait là l’occasion de faire entrer Staline en scène : « J’ai bien espéré que les Japonais arriveraient jusqu’à Chongqing », déclara-t-il plus tard.

Mais les espoirs de Mao furent déçus. Peng De-huai, passant outre l'opposition de celui-ci, lança une offensive contre les Japonais le 20 août. Le sabotage des voies ferrées et des axes routiers désorganisa pour un temps l’avancée japonaise, fit taire les rumeurs de guerres intestines entre nationalistes et communistes et redonna courage aux Chinois. Avec son cynisme habituel, Mao joua sur les deux tableaux : en public, il exaltait l’opération ; en privé, il fulminait contre Peng qui avait empêché l’élimination de Tchang par les Japonais. Comme nous le verrons plus tard, Peng devait payer chèrement ensuite ce fait d’armes….

Pour l’heure, Chongqing résistait. Pour éviter les affrontements avec les communistes, Tchang, qui restait officiellement commandant en chef de toutes les armées, avait ordonné une nouvelle répartition des hommes sur le terrain : aux rouges les territoires du Nord, aux nationalistes la région du Yangzi. Mao refusa tout net de se plier à cet ordre en espérant que son insubordination entraînerait une guerre civile et contraindrait enfin Staline à entrer dans la danse ! De fait, en octobre, les rouges attaquèrent les nationalistes au Pont Jaune et leur imposèrent une lourde défaite ; le bilan, 11 000 morts, était lourd mais Tchang renonça à exercer des représailles pour sauver ce qui pouvait rester du "front uni" et continuer la résistance contre le Japon. Mao, quant à lui, rongeait son frein :


dans une lettre du 3 novembre 1940 à Chou Enlai, Mao a écrit:Les deux choses que Tchang craint le plus, ce sont la guerre civile et l’Union soviétique. Nous allons donc lui mener la vie dure sur ces deux points.


Le plan qu’il soumit à Staline était d’envoyer 150 000 hommes attaquer les lignes arrières des nationalistes ; ceux-ci seraient ainsi pris en tenailles entre les forces japonaises et les forces communistes. Staline, qui envisageait alors d’adhérer au pacte que le Japon avait signé avec l’Allemagne nazie et l’Italie fasciste, était en pourparlers avec les Allemands ; Molotov, son ministre des Affaires étrangères, discutait avec Hitler des conditions d’une paix sino-japonaise. Mais Tokyo ne voulait rien lâcher, ou presque : il concédait aux Russes « une sphère d’influence » en Mongolie extérieure et au Xinjiang, ainsi que trois provinces du Nord-Ouest (le Shaanxi, le Gansu et le Ningxia) qui étaient déjà sous domination communiste : la paix n’avait donc aucun intérêt pour les soviétiques.

Pour conjurer tout risque d’invasion de la Russie par le Japon, Staline avait besoin d'une Chine unie dans laquelle les forces japonaises s’enliseraient ; laisser éclater la guerre civile entre les rouges et les nationalistes, s'aurait été laisser les coudées franches au Japon pour continuer sa route vers Moscou. C'est pourquoi Staline refusa à nouveau de céder à Mao ; il l’autorisait seulement à riposter en cas d’agression…. Mao se mit donc en devoir de contraindre Tchang à déclencher les hostilités….
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le piège et l'échec du scénario polonais

Messagepar laoshi » 08 Déc 2011, 12:38

Puisqu’il fallait que des rouges tombent sous les balles des nationalistes pour justifier aux yeux de Staline les agressions communistes contre Tchang, autant choisir un de ses adversaires victime : Xiang Ying, qui s’était opposé à la violence des purges « AB » et avait tenté d’empêcher Mao de quitter Ruijin, était tout désigné.

En 1940 l’état-major de Xiang Ying se trouvait encore au sud du Yangzi. Changeant brutalement son fusil d’épaule, Mao, qui avait jusque-là désobéi à l’ordre formel de Tchang, ordonna à Xiang de se replier au nord du Yangzi. Deux routes étaient possibles, l’une à l’Est, l’autre au Nord. Le 10 décembre, Tchang proposa la route du Nord et, Mao ayant accepté cet itinéraire le 29, il envoya cette dépêche à Xiang Ying dès le 3 janvier 1941 : « J’ai ordonné à toutes les armées stationnées le long de cette route de veiller à votre sécurité ». Entretemps, Mao avait donné un contrordre à Xiang et lui ordonna de prendre l’itinéraire interdit. Xiang répondit donc à la dépêche de Tchang qu’il prendrait la route de l’Est et lui demanda de lui ouvrir la route. Mais Mao s’était assuré que sa dépêche n’arriverait jamais à Tchang : toutes les communications devant passer par lui, il se garda bien de transmettre le message de Xiang au Généralissime !

Dans la nuit du 4 janvier, Xiang, ses 1000 officiers et ses 8000 hommes prirent donc la route de l’Est sans se méfier mais ils se heurtèrent très vite aux nationalistes qui, croyant à une attaque des rouges, ouvrirent le feu. Xiang envoya immédiatement une dépêche pressante à Mao puis plusieurs SOS lui demandant de faire le nécessaire auprès de Tchang pour que cessent les hostilités. Mao, qui prétendit ensuite n’avoir pas reçu l’appel de Xiang, n’en fit rien…. Cette « panne » opportune de ses services radio est pourtant démentie par Liu Shao-qi qui se fit le relai des SOS de Xiang le 9 janvier. Cette fois, Mao ne pouvait invoquer la panne ; le 10, Xiang avertissait que ses troupes allaient « tout entière être annihilées » en l’absence d’une intervention de Tchang pour rompre leur encerclement ! Cette fois, Mao ne feignit pas l’innocence ; avec son cynisme ordinaire, il écrivit à Chou Enlai, son agent de liaison à Chongqing : « je ne l’ai pas fait suivre […]. Cette dépêche ne doit absolument pas être transmise. » Le 12 janvier, Tchang donna l’ordre à ses hommes de cesser les combats. Le 13, Mao ordonna à Chou de lancer une campagne appelant à une « juste guerre » contre les nationalistes. Encore une fois, le tour était joué !

Cependant, les rouges chinois n’étaient pas capables d’en finir seuls avec Tchang. Chou alla donc plaider la cause de Mao à l’ambassade soviétique mais les Russes n’étaient pas dupes, ils soupçonnaient Mao d’avoir volontairement sacrifié Xiang Ying et Staline ne se laissa pas convaincre : « vous devez faire tout votre possible pour prévenir la guerre civile », ordonna-t-il à Mao le 13 février.

L’échec de Mao, néanmoins, n’était que relatif : il s’était débarrassé de Xiang Ying, assassiné par son aide de camp le 14 mars, et il avait obtenu que la Nouvelle 4°armée (N4A) reste au sud du Yangzi. Tchang était prêt à toutes les concessions non seulement pour éviter la guerre civile qui aurait compromis sa lutte contre le Japon mais encore pour conserver le soutien de Staline et celui des Etats-Unis. Roosevelt, comme Staline, souhaitait en effet que les Japonais s’enlisent dans l’immense territoire chinois et conditionnait son aide financière au maintien du « front uni » ; or, en tombant dans le piège que lui avait tendu Mao, Tchang était apparu aux Occidentaux - qui, en l’occurrence, étaient sensibles à la propagande communiste relayée par Edgar Snow et par Lauchlin Currie (un conseiller de la Maison Blanche prosoviétique !) -, comme le fauteur de guerre. Les chiffres avancés par la propagande communiste (10 000 morts dans les rangs de Xiang Ying) étaient pris pour argent comptant (ils n’étaient qu’environ 2000 en réalité). N’ayant jamais fait mention des attaques et des lourdes pertes que subissaient ses troupes de peur de démoraliser la population, Tchang passait pour l’agresseur alors qu’il n’avait fait, jusqu’alors, que riposter aux agressions communistes. Zhu De le reconnaissait d’ailleurs sans ambages : « Les nationalistes sont battus et se taisent ; nous gagnons, pourquoi irions-nous le crier sur les toits ? ».
Hemingway, qui se trouvait alors en Chine, analysait quant à lui beaucoup plus lucidement la situation :
Hemingway a écrit:L’Amérique se fait une idée exagérée du rôle que [les communistes] ont joué dans la guerre contre le Japon. Leur rôle a été considérable mais celui des troupes du gouvernement a été cent fois plus important.

Le soutien des USA et de la Grande-Bretagne au « front uni » avait longtemps inquiété Mao. Il redoutait par-dessus tout que le Japon capitule face à l’Occident et que Tchang s’allie ensuite au « bloc anglo-américain » pour se retourner contre les rouges. Seule l’occupation durable du pays par le Japon, l’élimination de Tchang et la conclusion d’un pacte japono-soviétique pouvaient lui permettre de se tailler un empire en Chine. Mais ses désirs ne se réalisèrent pas : le 13 avril 1941, Staline conclut un pacte de non-agression pour cinq ans avec le Japon. La menace d’invasion de la Russie par l’Empire du Soleil Levant (option qui était celle du haut-commandement japonais) était écartée au profit de la stratégie préconisée par la marine nippone qui voulait porter la guerre dans l’Océan Pacifique. Mao, abandonnant définitivement l’idée d’un scénario à la polonaise, Mao amorça un revirement spectaculaire :
dans une lettre du 6 novembre 1941 à Chou Enlai, Mao a écrit: l’adhésion de Tchang au bloc anglo-américain est entièrement à notre avantage […]. Ne nous y opposons plus […]. Et forgeons nous-mêmes d’autres liens avec la Grande-Bretagne et l’Amérique […].
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1941-1945 : La terreur de Yan’an

Messagepar laoshi » 11 Mai 2012, 09:22

Le 22 juin 1941, l’invasion de l’Union soviétique par Allemagne ruinait le plan de Mao. Ne pouvant plus compter sur une intervention des Russes, il ordonna aussitôt à ses troupes de « cesser tout assaut contre les unités nationalistes » et, puisqu’il n’était plus question de se battre, il se concentra sur un objectif intérieur : dompter les nouveaux adhérents arrivés en masse à Yan’an.

Arrivés dans l’enthousiasme, ces jeunes volontaires n’avaient pas tardé à déchanter : leur idéal d’égalité avait d’emblée été mis à mal par les privilèges que se réservait l’élite rouge ; rations alimentaires, vêtements, médicaments, soins hospitaliers, crèches, nourrices, tout était attribué en fonction d’une stricte hiérarchie : « Ce ne sont pas les camarades dirigeants qui demandent eux-mêmes ces privilèges, disait la propagande. C’est un ordre du Parti. Prenez le président Mao, par exemple : le Parti peut lui ordonner de manger un poulet par jour. »Mais la propagande avait beau faire, les désertions étaient à la mesure de la désillusion. Pour prévenir l’hémorragie, Mao entreprit une campagne de rééducation massive, appelée « zheng-feng », dès mars 1942. La première victime de ce « mouvement de rectification » fut Wang Shi-Wei qui dénonçait les passe-droits et les privilèges :


Wang Shi Wei, dans Le Quotidien de la Libération, le 13 mars 1942 a écrit: je ne pense pas qu’il soit nécessaire, ni justifié, d’avoir de multiples degrés dans l’alimentation et la tenue vestimentaire […]. Si, alors que les malades n’ont même pas droit à une gorgée de soupe aux nouilles, […] de gros bonnets en pleine santé jouissent d’avantages tout à fait superflus et injustifiés, les subalternes leur en voudront.


Wang Shi Wei sur une affiche a écrit: Il faut établir la justice dans le Parti. […] Posez-vous donc la question, camarades […]. Avez-vous peur de dire aux « gros bonnets » ce que vous pensez vraiment […] ? Ou bien êtes-vous le genre de personne qui excelle à persécuter les « petites gens » en les accusant de crimes inventés de toutes pièces ?

La riposte de Mao fut immédiate : Wang Shi Wei, qui avait traduit Engels et Trotski, qui osait, en privé, dénoncer les purges de Staline et les procès de Moscou, fut accusé de trotskisme et arrêté (il ne fut sorti de son cachot que pour une « confession » publique en 1944, il fut poignardé lors de l’évacuation de Yan’an en 1947 et son corps fut jeté dans un puits). Mais Wang Shi Wei était immensément populaire et il fallait aussi mettre au pas ceux qui le soutenaient. A partir d’avril 1943, ils furent collectivement accusés d’espionnage au service de Tchang et placés en détention dans des prisons creusées dans les collines de lœss de Yan’an, sur leur lieu de travail ou d’enseignement. Il y a là une spécificité durable du totalitarisme chinois : l’implication de tout un chacun dans l’appareil répressif, la transformation des lieux de production ou d’éducation en quasi-prisons et celle des collègues ou des condisciples en geôliers. Il va sans dire que les véritables espions – que Mao évaluait à 1% tout au plus -, faisaient l’objet de méthodes plus expéditives : « on leur réglait leur compte sans faire de bruit », dira Shi Zhe, responsable des services de sécurité de Mao.

Il s’agissait en l’occurrence de produire la docilité de masse par la terreur de masse. Tout était bon pour obtenir des « aveux forcés »,
逼供 [bī gōng xìn] : privation de sommeil, fouet, suspension par les poignets, « banc du tigre » (torsion des genoux à la limite de la rupture ligamentaire), simulacres d’exécution, menaces de lâcher des serpents venimeux dans les cellules, etc. Les aveux fournissaient de nouveaux suspects et le cycle infernal recommençait. Des interrogatoires publics, devant des foules hurlantes, complétaient le dispositif : toute la population subissait ainsi « une épouvantable guerre des nerfs » sans aucun exutoire possible. Le chant et la danse étaient interdits ; depuis le printemps 1942, Mao avait même proscrit l’humour : « parler à tort et à travers » pouvait valoir accusation d’espionnage ! Les seuls « loisirs » consistaient à rédiger son « examen de conscience » :

Mao a écrit: Obligez tout le monde à rédiger un examen de conscience et à le recopier trois fois, cinq fois, autant de fois qu’il le faudra […] Dites bien à tous de révéler la moindre pensée qu’ils ont pu avoir et qui ne serait pas bonne pour le Parti.

Il était interdit de coucher ses réflexions personnelles sur le papier : les journaux intimes, suspects, devaient être remis au Parti ! Chacun avait l’ordre formel de « noter par écrit chacun de ses rapports sociaux, quels qu’ils soient », et de consigner « les petites diffusions », tous les « on-dit ». Toute réticence valait aveu de culpabilité. Au bout de deux ans de ce régime, qui suscitait à la fois la terreur des autorités et celle des autres, les jeunes volontaires arrivés à Yan’an pleins d’enthousiasme n’étaient plus que des robots :

un journaliste de Chongching autorisé à visiter Yan’an en juin 1944 a écrit: Si vous posez la même question à vingt ou trente personnes, des intellectuels aux ouvriers, leurs réponses sont toujours plus ou moins semblables […]. Même pour les questions sur l’amour, on dirait qu’il existe un point de vue adopté lors de réunions. […] Tous nient pourtant avec une ferme unanimité que le Parti exerce le moindre contrôle sur leurs pensées.

Mao ordonna aux autres bases rouges d’entreprendre leur propre chasse aux sorcières en gonflant à 10% le pourcentage des suspects que chacune devait débusquer en son sein. Quant à lui, il commença à relâcher la pression sur Yan’an en 1944 et ordonna une réhabilitation massive des victimes au printemps 45 : sachant que la Russie allait entrer en guerre contre le Japon, il savait qu’une fois le Japon vaincu, il aurait besoin de cadres pour lutter contre Tchang. Il présentait ses excuses avec un art consommé de l’hypocrisie, en faisant mine de prendre sur lui les fautes de tous les autres :

Notre intention était de vous donner un bon bain, mais on a versé dedans une trop forte dose de permanganate de potassium, si bien que votre peau délicate en a été irritée. […] C’était comme quand un père bat ses fils. Alors, s’il vous plaît, ne nous en veuillez pas.

Beaucoup de jeunes volontaires, cherchant un sens à ce qu’ils avaient subi, se laissèrent persuader « d’épousseter leurs vêtements et de reprendre la lutte » pour « servir le peuple »…. Mao avait désormais entre les mains une puissante machine de guerre contre Tchang dont cette campagne de terreur avait aussi pour but de détruire l’image. Tchang menait incontestablement la guerre contre le Japon et son bilan, sur le plan national et international, n’était pas mince : en 1943, il avait obtenu la rétrocession des territoires concédés aux USA et à la Grande-Bretagne à l’exception de Hong-Kong, il avait mis au pas les seigneurs de la guerre, haussé la Chine au rang de 4°grande puissance mondiale – ce qui devait lui valoir un siège permanent un droit de veto au Conseil de sécurité de l’ONU. Désormais, à la question « Qui a rebâti la Chine, les nationalistes ou le PCC ? », chacun savait ce qu’il fallait répondre !
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1941-1945 : purges au sommet

Messagepar laoshi » 12 Mai 2012, 16:11

Obtenir la docilité des jeunes volontaires était une chose, briser les opposants haut placés en était une autre. Dès l’automne 1941, Mao avait organisé des réunions du Bureau Politique au cours Lo Fu et Po Ku, entre autres, s’étaient plié à d’humiliantes autocritiques. Restaient à mater trois personnalités de premier plan : Wang Ming, Zhou Enlai et Peng De-huai.

Wang Ming, surtout, refusait de se soumettre. Sachant que Staline reprochait à Mao de n’avoir rien fait pour empêcher les Japonais d’ouvrir un deuxième front contre l’URSS, il mit celui-ci au défi de justifier sa politique, y compris à l’égard de Tchang. Cela, évidemment, ne faisait pas l’affaire de Mao : cela faisait 7 ans qu’il occupait le poste de n° 1 du Parti sans aucun mandat officiel et il comptait bien réunir le Congrès pour faire avaliser son leadership sur le PCC. Le défi de Wang Ming, qui l’accusait « d’établir sa dictature personnelle » et auquel risquait fort de se rallier le Congrès, tombait donc très mal pour Mao.
La première tentative d’empoisonnement eut lieu en mars 1942, voire en octobre 41. L’empoisonneur n’était autre que le médecin de l’hôpital, Jin Mao-yue : après avoir préconisé des opérations injustifiées, il avait prescrit à son patient un mélange de calomel et de soude responsable d’un empoisonnement au mercure. « Après neuf mois de traitement », Wang Ming était « aux portes de la mort ». Il dut son salut à l’arrivée d’un agent de liaison et d’un chirurgien russes, Piotr Vladimirov et Andreï Orlov.
Le 8 janvier 43, Wang Ming écrivit à Staline pour dénoncer les « nombreux crimes de Mao » ; il accusait celui-ci d’être « antisoviétique et anti-PCC » et demandait à être soigné à Moscou. Le 12 février, alors que Vladimirov venait de faire parvenir le message à Dimitrov, le chef du Komintern, Jin prescrivit le même mélange, puis des lavements à l’acide tannique. Cette fois, Wang Ming s’abstint de prendre le traitement et conserva les ordonnances prouvant l’empoisonnement.
Le 20 mars 43, profitant de la « maladie » de Wang Ming, Mao réunit en secret le Bureau politique et se fit nommer chef suprême du Parti. Il devenait ainsi président du Bureau politique et du Secrétariat et avait désormais le « pouvoir de prendre des décisions définitives sur toutes les questions » !

Le 22 mars 43, Orlov câbla une des ordonnances suspectes à Moscou. La réponse était claire : « Ce traitement cause un lent empoisonnement et dans les cas sérieux entraîne la mort ». Jin Mao-yue plaida l’erreur médicale et ne subit aucune sanction, bien au contraire : il fut transféré au Jardin des Dattes où il partagea la vie de l’élite du Parti. Quant à Mao, il réussit à garder Wang Ming en son pouvoir sous prétexte que l’enquête n’était pas close ! Pour couper l’herbe sous le pied de ses accusateurs, il se fit habilement blanchir de tout soupçon par ses victimes elles-mêmes : le 1° novembre, un détenu libéré sur son ordre assura publiquement que Mme Wang le disait l’instigateur de l’empoisonnement. La pauvre n’eut d’autre solution que d’écrire une lettre au Bureau politique jurant que ni elle ni son mari n’avaient jamais imaginé une chose pareille et qu’ils restaient, au contraire, pleins de gratitude envers Mao….

Dans le même temps, Staline et Mao se livraient à un bras de fer. Staline essaya d’échanger le retour en Chine du fils aîné de Mao – qui faisait ses études en Russie -, contre le départ de Wang Ming pour Moscou ; il envoya deux avions à Yan’an, l’un le 19 août, l’autre le 20 octobre ; Mao resta inflexible.
Staline n’était pas disposé à accepter une telle insoumission. Le 22 décembre, il lui fit envoyer par Dimitrov une dépêche sévère : « limiter la lutte contre l’occupant » « rompre le front uni », mener « campagne pour incriminer » Wang Ming (et, avec lui, Zhou Enlai) telles étaient ses principales « erreurs » politiques.
Mao, furieux, répondit le 2 janvier 1944 sur un ton de défi ; il affirmait ne pas « avoir limité la lutte contre les Japonais », ne pas avoir interrompu « la collaboration » avec les nationalistes et accusait Wang Ming « d’activités anticommunistes » ; le seul fait que son adversaire ait été libéré après avoir été « arrêté à Shanghai » suffisait à le rendre suspect. Visiblement inquiet de sa propre audace, il écrivit le 7 janvier un nouveau télégramme à Dimitrov l’assurant qu’il « étudierait de près [ses] instructions » et qu’il veillerait à l’unité interne du Parti : « C’est, disait-il, dans cet esprit que nous nous comporterons vis-à-vis de Wang Ming ».
Pour témoigner de sa bonne foi, Mao rendit alors deux longues visites à Wang Ming ; le 28 mars, il envoya à télégramme à son fils pour lui demander de rester en Russie. Russes et Chinois avaient abouti à un compromis : Wang Ming resterait au pouvoir de Mao, dont Staline garderait le fils aîné en otage pour garantir la vie sauve à son adversaire….

Wang Ming, désigné à la vindicte publique dès 1942 lors de la campagne de terreur de Yan’an, passait désormais aux yeux de tous pour l’ennemi numéro Un, il n’était plus en mesure contester la suprématie de Mao qu’il avait mis au défi de débattre avec lui en vue du Congrès.

Vint ensuite le tour de Zhou Enlai. En tant que responsable des organisations communistes opérant dans les zones nationalistes, Zhou était ipso facto considéré comme un maître espion ! De retour à Yan’an en juillet 43, il fit son autocritique au mois de novembre. Pendant cinq jours, il avoua devant le Bureau politique avoir « commis des crimes très graves », avoir été « le complice » de Wang Ming et s’être fait l’« esclave » des nationalistes ; il remercia ensuite publiquement Mao d’avoir « sauvé » le Parti des dérives dont lui et ses pareils étaient coupables !

Le cas de Peng De-huai fut traité en dernier : commandant par intérim de la 8° Armée de route, Peng s’était opposé à Mao dès les années 30, il avait, contre les ordres de Mao, mené l’offensive contre les Japonais et avait osé parler de ses idéaux - « la démocratie, la liberté, l’égalité et la fraternité » - « comme s’il s’agissait d’authentiques idéaux » et non comme de simples outils de propagande ! Revenu à Yan’an sur les ordres de Mao, en 1943, il ne s’était pas privé de critiquer les abus et, en particulier, le culte que Mao édifiait autour de sa personne. La riposte de Mao, au début 45 jusqu’à la capitulation japonaise, consista à l’exposer périodiquement à la vindicte des foules robotisées au cours d’interminables meetings de dénonciation. En cinq ans à peine, Mao avait « maté tous ses adversaires »….
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1945 : Le triomphe de Mao au VII° Congrès

Messagepar laoshi » 17 Mai 2012, 14:17

La campagne de terreur lui avait aliéné tant de sympathies que Mao jugea plus prudent d’abandonner sa résidence publique de Yan’an pour s’installer au Jardin des Dattes, à plusieurs kilomètres de là. Il s’y fit aménager, dans « le ravin de derrière », un repaire qui lui permettait de passer d’un versant de la colline à l’autre par un passage souterrain ; un passage secret reliait également ses appartements à un grand auditorium qui ressemblait à une cathédrale et qui ne servit pratiquement jamais.

En authentique Machiavel chinois, Mao savait bien qu’à tout prendre, il vaut mieux, pour « le Prince », se faire craindre que de se faire aimer. La terreur avait en effet pour lui un avantage immédiat : ceux qui en étaient les principaux artisans vivant eux-mêmes dans la terreur, il était plus facile de leur faire plier l’échine.
C’est ainsi qu’il « tenait » Kang Sheng, le chef du KGB chinois. Kang Sheng avait, comme beaucoup d’autres, été arrêté par les nationalistes, il pouvait donc passer pour un traitre ; il avait participé aux purges staliniennes et Staline, qui le jugeait « louche », avait même conseillé à Mao de s’en séparer. Mao trouva, au contraire, dans cette suspicion l’épée de Damoclès qui lui permettrait de le plier à sa volonté. C’est aussi ce qui lui permit d’avoir barre sur Zhou Enlai pendant toute sa carrière. Même chose pour Liu Shaoqi et pour bien d’autres. Revenu à Yan’an à la fin de l’année 42, Liu Shaoqi s’était d’abord élevé contre la campagne de terreur mais, ayant été arrêté puis relâché à plusieurs reprises par les nationalistes, il était ipso facto désigné comme suspect ; il le comprit vite et devint l’un des agents les plus zélés de la terreur (il restera jusqu’en 1966 le bras droit de Mao)…. Sa femme, qui fit brièvement l’expérience des traitements réservés aux transfuges des zones nationalistes, apprit comme lui qu’il valait mieux se faire tortionnaire plutôt que de tomber sous les coups des bourreaux. Même scénario pour Jiang Qing. La quatrième épouse de Mao, arrêtée par les nationalistes, avait abjuré le communisme et, semble-t-il, usé de ses charmes pour obtenir sa libération. Beaucoup de communistes la tenaient en piètre estime et son mariage avait suscité beaucoup de réticences chez les compagnons de Mao. Vivant dans la crainte obsessionnelle de voir resurgir son passé, elle s’employa à faire taire tous ceux qui en savaient trop à son sujet et devint, comme elle devait le déclarer elle-même plus tard, « le chien de Mao ». Sa première victime fut la nourrice de Li Na, la fille qu’elle avait eue de Mao en 1940. Jiang Qing l’accusa d’empoisonnement parce qu’elle souffrait de diarrhées ; la jeune fille resta neuf mois à filer dans une grotte avec d’autres prisonnières.

Le deuxième avantage de cette campagne de terreur, ce fut de permettre à Mao de mettre en place le culte de sa personnalité. D’abord réticents à crier « Vive le président Mao » comme on le faisait pour les empereurs, les communistes de Yan’an prirent vite le pli. Mao contrôlait Le Quotidien de la Libération dont les titres éloquents construisaient pas à pas le mythe : « Le camarade Mao Zedong est le sauveur du peuple chinois », y lisait-on par exemple. Vinrent ensuite les badges, à l’initiative du même journal, un bas-relief doré ornant la façade de la grande salle de réunion de Yan’an, puis les portraits imprimés en série sans oublier L’Orient est rouge, un hymne à sa gloire récemment remis au goût du jour par Bo Xilai. La « pensée Mao Zedong », un texte rédigé par Wang Jia-xiang sur les conseils de Mao, devint une lecture obligatoire dès 1943. L’histoire fut réécrite sans vergogne : Mao devint tout à coup le leader qui, en 1922, avait impulsé le mouvement syndical du Hunan ; la désastreuse bataille de Tusheng, livrée sur son ordre durant la longue Marche, fut mise au compte de ceux qui « viol[aient] les principes inculqués par Mao Zedong » ; à l’inverse, le mérite de l’expédition militaire de Pingxingguan, qu’il avait interdite, lui fut attribué.

Lorsqu’enfin le VII° Congrès du PCC s’ouvrit à Yan’an, le 23 avril 1945, plus personne n’osait s’opposer à Mao qui devint président du Comité Central, du Bureau Politique et du Secrétariat….
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