Les festivités du Nouvel an chinois

Postez ici vos images des grandes fêtes chinoises, proposez-nous vos reportages, vos descriptions ou vos commentaires

Les festivités du Nouvel an chinois

Messagepar laoshi » 17 Déc 2011, 07:25

Les Chinois entreront dans l'année du dragon le 23 janvier 2012... en attendant, voici quelques informations sur les traditions liées au changement d'année telles que les décrit Jung Chang dans Les Cygnes sauvages à travers les souvenirs de sa mère...

Traditionnellement, les festivités présidant au Nouvel An chinois débutaient le vingt-troisième de la douzième lune, soit sept jours avant
, [chun jie], « la fête du printemps ». Ce jour-là, selon la légende, le dieu de l’Atre, dont le portrait était accroché au-dessus du fourneau, avec celui de son épouse, montait au Ciel : il allait faire son rapport à l’Empereur céleste. Si la famille s’était bien comportée pendant l’année, l’Empereur céleste lui accorderait une année prospère, et, en particulier, une nourriture abondante. Pour se concilier les bonnes grâces de cet intermédiaire sourcilleux, chacun se prosternait devant les deux images ; certains prenaient la précaution d’enduire d’un peu de miel les lèvres du dieu et de son épouse afin que leurs paroles soient dénuées de toute amertume. Ensuite, on brûlait les deux effigies pour leur permettre de monter au Ciel. Une cohorte de serviteurs, sous la forme de figurines de sorgho, brûlait avec elles : mieux valait ne rien négliger pour s’assurer un rapport bienveillant et les dieux, à l’image des hommes, aiment être servis…
laoshi
Avatar de l’utilisateur
laoshi
Administrateur
 
Messages: 3912
Inscrit le: 06 Juil 2011, 06:23

"fouetter le printemps"

Messagepar laoshi » 02 Jan 2012, 11:27

En travaillant sur mon bestiaire de la langue, j'ai découvert l'existence d'une coutume associée aux cérémonies du nouvel an aujourd'hui tombée en désuétude.

Cette cérémonie consistait à
[dǎ chūn niú] "battre le boeuf de printemps" , à [biān tǔ niú] "fouetter le bœuf" ou encore à 鞭春 [biān chūn] "fouetter le printemps" dans l’espoir d’obtenir de bonnes récoltes.

Le
[chūn niú] "bœuf du printemps", anciennement en terre, postérieurement en roseau ou en papier, était brisé ou déchiqueté en sacrifice à la cérémonie de l’accueil du printemps. Voilà la description qu'on trouve dans L'Histoire générale de la Chine de Le Roux Deshauterayes, un ouvrage daté de 1785 :

On promène, dans cette cérémonie, une grande vache de terre cuite, et dont les cornes sont dorées. Quarante hommes ont quelquefois beaucoup de peine à la porter. Un enfant la suit, ayant un pied chaussé et l’autre nu : on le nomme « l’Esprit du travail et de la diligence ». Il frappe sans cesse avec une verge ce simulacre, comme pour le faire avancer. Il est suivi de tous les laboureurs, armés de leurs instruments aratoires. Des masques, des comédiens ferment la marche, et donnent au peuple des spectacles plus ou moins grotesques.
Le gouverneur s’avance vers la porte de l’Orient, comme s’il voulait aller à la rencontre du printemps : de là il retourne dans son palais dans le même ordre. Alors on dépouille la vache de tous ses ornements, on tire de son ventre un nombre prodigieux de petites vaches d’argile, et on les distribue à toute la troupe. On met en pièces la grande vache, et les morceaux en sont également distribués. Le Gouverneur termine la cérémonie par un petit discours à la louange de l’agriculture, et pour exciter les auditeurs à ne point négliger un art si utile.


Il est probable qu'un véritable sacrifice soit à l'origine de cette cérémonie ; elle me rappelle en tout cas des descriptions de sacrifices dans lesquels une vache est littéralement déchiquetée par toute la tribu. René Girard donne une description saisissante de ce sacrifice sanglant tel qu'il est accompli chez les Dinka africains dans La Violence et le Sacré . Saint Gérôme décrit le même rituel sur un chameau en Afrique du Nord dans l'antiquité tardive et Dominique Fernandez affirme dans Porporino qu'il existait encore, sur une vache, chez les Napolitains au XVIII° siècle.
laoshi
Avatar de l’utilisateur
laoshi
Administrateur
 
Messages: 3912
Inscrit le: 06 Juil 2011, 06:23

le monosandale

Messagepar Faustula » 03 Jan 2012, 14:34

Un détail retient mon attention, à propos de l'enfant qui mène la vache au "sacrifice" :

Un enfant la suit, ayant un pied chaussé et l’autre nu


Cela me suggère un nouveau "lien entre l'Asie et la culture antique greco-romaine". Cette dissymétrie de la marche est un grand classique des mythologies : on le trouve de manière récurrente dans l'imaginaire indo-européen lorsqu'il s'agit d'aller du Ciel à la Terre ou des Enfers à la Terre et inversement. Je crois que ce motif a déjà été évoqué, d'ailleurs, à propos de la Fête des Lanternes dans Ju Dou.
Faustula
Avatar de l’utilisateur
Faustula
 
Messages: 43
Inscrit le: 06 Juil 2011, 10:11

boîter pour faire venir le printemps

Messagepar laoshi » 03 Jan 2012, 15:50

Oui, j'évoque cette claudication à propos du répertoire freudien du film : les enfants, portant des lanternes, font effectivement la ronde à cloche-pied, comme les enfants qui jouent à la marelle et vont de la Terre au Ciel... Dans Ju Dou, il s'agit de la Fête de la lune, où l'on célèbre de Dieu du Sol et les récoltes de l'année ; ici, il s'agit de la Fête du Printemps où la nature reverdit, permettant les récoltes à venir. Il faut donc boîter pour accueillir le printemps et pour congédier l'automne...
laoshi
Avatar de l’utilisateur
laoshi
Administrateur
 
Messages: 3912
Inscrit le: 06 Juil 2011, 06:23

hommage au dieu de la Bonne Fortune

Messagepar laoshi » 04 Jan 2012, 10:17

Jung Chang raconte dans Les Cygnes sauvages les festivités du Nouvel an telles qu'elles se déroulaient dans l'enfance de sa mère, à la fin des années trente, en Mandchourie ; dans la semaine qui suivait les suppliques au dieu de l'Atre, les femmes de la maisonnée passaient leur temps en cuisine pour préparer les mets de Nouvel an, petits pains, boulettes, rouleaux etc....
La veille du Nouvel an, à minuit, chacun sortait à la rencontre du dieu de la Bonne Fortune et se prosternait dans sa direction à la lumière du feu d'artifice puis les voisins se souhaitaient mutuellement une bonne année en disant : "que la chance vous sourie".
Dans les familles qui en avaient les moyens, les enfants recevaient de leurs parents des vêtements neufs pour étrennes ; quant aux voisins et aux amis de leurs parents, ils les gratifiaient d'une "enveloppe rouge" renfermant quelques sous qui leur serviraient d'argent de poche pendant toute l'année.
Les quinze jours suivants étaient consacrés à l'échange des voeux entre parents et amis ; c'était, pour beaucoup, l'occasion de faire bombance et de manger de la viande...
laoshi
Avatar de l’utilisateur
laoshi
Administrateur
 
Messages: 3912
Inscrit le: 06 Juil 2011, 06:23

La fête des lanternes à la fin du XVIII° siècle

Messagepar laoshi » 04 Jan 2012, 10:40

Le point culminant des festivités du Nouvel An chinois est bien évidemment la fête des lanternes, [dēng jié] ou, plus spécifiquement pour la nuit de cette fête, [yuán xiāo jié].

Voici le récit qu'en donne Le Roux Deshauterayes, que j'ai déjà cité plus haut, à la fin du XVIII° siècle :


La fête des lanternes est fixée au quinzième jour du premier mois ; mais elle commence dès le treize au soir, et ne finit que dans la soirée du seizième. […] Cette cérémonie est universelle dans l’Empire ; et le même jour, à la même heure, on peut dire que toute la Chine est illuminée. Les villes, les villages, les rivages de la mer, le bord des rivières sont garnis de lanternes peintes, et d’une forme variée. On en voit dans les cours et aux fenêtres des maisons les plus pauvres. Les citoyens riches dépensent jusqu’à deux cents francs par lanterne. Celles que font faire les grands Mandarins, les Vice-Rois et l’Empereur coûtent quelquefois jusqu’à trois et quatre mille livres chacune. […]
Ces lanternes sont très grandes ; quelques-unes sont composées de six panneaux, encadrés dans des bois peints ou dorés. Le panneau est composé d’une toile de soie fine et transparente, sur laquelle on a eu soin de peindre des fleurs, des animaux et des figures humaines ; d’autres sont rondes, faites d’une corne bleue et transparente. On met dans ces lanternes beaucoup de lampes et un grand nombre de bougies. On attache à chaque angle des banderoles de satin et de soie, qui diffèrent de couleur ; et la lanterne est couronnée par un morceau de sculpture.

Notre lanterne, dite magique, est connue des Chinois, ou peut-être la tenons-nous d’eux. Ils en font usage dans cette fête.
« D’autres fois, dit le P. du Halde, ils font paraître des ombres qui représentent des Princes et des Princesses, des soldats, des bouffons, et d’autres personnages dont les gestes sont si conformes aux paroles de ceux qui les remuent, qu’on croirait les entendre parler véritablement. » […]

Ils ont de plus l’art de former un serpent garni intérieurement de lumières depuis la tête jusqu’à la queue, de soixante à quatre-vingt pieds, et de lui faire faire toutes les évolutions que ferait un serpent réel.

Les feux d’artifice des Chinois sont renommés, et méritent de l’être. On les multiplie surtout durant la fête dont nous parlons. On en tire dans chaque quartier de la ville. Un missionnaire en a décrit deux que nous allons rappeler. Le corps de l’artifice représentait une treille de raisin rouge ; la treille brûlait sans se consumer, et les parties qui composaient l’artifice ne se consumaient que très lentement. Elles représentaient des grappes rouges, des feuilles vertes, etc.
L’autre feu d’artifice fut tiré en présence et aux frais de l’Empereur Kang-hi. Il commença par une demi-douzaine de gros cylindres, suspendus par de longs pieux fichés en terre Ces cylindres formaient en l’air des jeux de flamme qui s’envolaient à la hauteur de douze pieds et retombaient ensuite en pluie d’or.
« Ce spectacle, dit le narrateur, fut suivi d’un grand caisson d’artifice, guindé à deux grands pieux ou colonnes, d’où il sortit une pluie de feu, avec plusieurs lanternes, des écriteaux en gros caractères de couleur de flamme et de soufre, et enfin une demi-douzaine de lustres en forme de colonnes, à divers étages de lumières, rangées en cercles, blanches et argentines, qui étaient très agréables à la vue, et qui, tout à coup, firent de la nuit un jour très clair.
Enfin, l’Empereur mit de sa propre main le feu au corps de l’artifice ; et, en peu de temps, le feu passa dans tous les quartiers de la place, qui avait quatre-vingt pieds de long sur quarante ou cinquante de large. Le feu s’étant attaché à diverses perches et à des figures de papier plantées de tous côtés, on vit une multitude prodigieuse de fusées faire un jeu en l’air, et en même temps, un grand nombre de lanternes et de lustres s’allumer dans toute la place.
Ce jeu dura plus d’une demi-heure, et, de temps en temps, il paraissait en quelques endroits des flammes violettes et bleuâtres, en forme de grappes de raisin attachées à une treille, etc. On a peut-être, de nos jours, porté encore plus loin la pyrotechnie en France ; mais, sous le règne de Kang-hi, c’était à la Chine qu’il fallait en chercher les modèles.»
laoshi
Avatar de l’utilisateur
laoshi
Administrateur
 
Messages: 3912
Inscrit le: 06 Juil 2011, 06:23

diaporama : Le Nouvel an chinois à Paris en 2006

Messagepar laoshi » 23 Jan 2012, 22:14

J'ai suivi le cortège de la danse du dragon à Paris en 2006 ; je vous ai fait un petit diaporama de 10 minutes, dont je vous donne un aperçu dans un format modeste ci-dessous



mais que vous pouvez voir en grand écran en utilisant ce
lien internet

laoshi
Avatar de l’utilisateur
laoshi
Administrateur
 
Messages: 3912
Inscrit le: 06 Juil 2011, 06:23

Sur la fête des lanternes, pour éclairer la mienne !

Messagepar laoshi » 03 Fév 2012, 16:06

Le temps fort des festivités du nouvel an chinois interviendra dans quelques jours avec [yuán xiāo jié], la nuit du 15e jour de la première lune, où l'on va admirer les lanternes, ou le jour suivant avec la Fête des lanternes, le 6 février exactement.

A cette occasion, des devinettes
笼谜 [dēng lóng mí] sont écrites sur les lanternes ; j'avais demandé à ma petite correspondante de me donner des exemples de ces devinettes, avec leur solution, mais elle a apparemment oublié, tout occupée qu'elle est sans doute à visiter toute sa famille et à profiter de ses vacances universitaires pour voir ses amis. Je n'ai donc aucun exemple à vous proposer mais peut-être certains d'entre vous (pourquoi pas de nouveaux lecteurs qui pourraient s'inscrire à cette occasion), pourront-ils, justement, "éclairer ma lanterne"...
laoshi
Avatar de l’utilisateur
laoshi
Administrateur
 
Messages: 3912
Inscrit le: 06 Juil 2011, 06:23

Re: Les festivités du Nouvel an chinois

Messagepar mandarine » 05 Fév 2012, 14:14

La fête des lanternes c'est demain 6 février !

Chine-Nouvelle nous donne son origine

Chine-Nouvelle.com a écrit:

Fête des Lanternes

La fête des Lanternes arrive le 15 du premier mois lunaire (environ en février ou en mars). Elle est devenue une fête essentielle sous la dynastie des Han de l'Ouest (206 av. J.-C.-25).

Les fêtes traditionnelles chinoises

Admirer les lanternes est l'une des plus principales activités de la fête. Sous la dynastie des Han (206 av. J.-C.-220), le bouddhisme s'est répandu largement en Chine. Après avoir appris que les moines avaient coutume le 15 du 1er mois lunaire de regarder les reliques du bouddha et d'allumer des lampes pour saluer les génies, l'empereur a ordonné d'allumer aussi ce jour au soir des lanternes dans le palais impérial et les temples pour présenter ses respects aux génies. Depuis lors, ce rite bouddhique est devenu progressivement une grandiose fête populaire en Chine.

Aujourd'hui encore, lors de la fête des Lanternes, toutes les régions organisent une exposition de lanternes. On admire ces belles lanternes de différentes formes et les enfants s'amusent dans la rue, en tenant à la main une lanterne fabriquée par leur famille ou achetée dans le magasin.

Jouer aux devinettes qui sont écrites sur les lanternes est une activité populaire. Si on a trouvé le mot de l'énigme, on peut remporter un cadeau. Cette activité date de la dynastie des Song (960-1279). Jouer aux devinettes est un jeu intelligent qui fait valoir la sagesse des gens. Ce jeu a donc les faveurs du peuple chinois de toutes origines sociales.

Manger des boulettes de riz glutineux fourrées (appelées aussi tangyuan) est une coutume de la fête des lanternes. On mêle respectivement des grains de sésame, des purées d'haricot rouge, des noix, des cacahouètes, des pâtes de jujubes d'une part et du sucre et de l'huile de l'autre part pour faire des boulettes. Ensuite, on les enveloppe dans la farine de riz glutineux. On peut les cuire, les frire ou les cuire à la vapeur. Le tangyuan sucré et parfumé symbolise la réunion et le bonheur de la famille.

Dans la journée, on organise des représentations artistiques : la danse des lions, la danse du dragon, la danse du bateau, la danse de yangge, la danse aux tambourins et la marche sur des échasses. Le soir, on admire en plus des lanternes des feux d'artifices magnifiques. Dans plusieurs villes, le gouvernement organise de tels feux. Dans la nuit de la première pleine lune, les feux et les lanternes qui éclairent la terre et la lune dans le ciel font ressortir l'un l'autre, donnant un paysage charmant.


Quelques photos de divers sites


Temple du Bouddha de Jade Shanghai
je me demande ce qui peut bien être inscrit sur les " étiquettes " qui pendent des lanternes

1 Image


2 Image


3 Image

4 Image

5 Image


6 Image

7 dans un jardin à Suzhou

Image

8 Yu Yuan shanghai

Image

9 Image

10 Image

11 Image

12 Xi'An

Image

13 Image

14 Image

je n'ai pas compris ce que me disait la marchande à propos de la lanterne...

15 Image

faites un clic gauche sur les images pour les obtenir en grand format
Dernière édition par mandarine le 06 Fév 2012, 11:02, édité 1 fois au total.
Les autorités de votre pays,qui elles aussi pensent forcément à leurs intérêts,ne manqueront pas de comprendre combien le type de célébrité que leur vaut la persécution de personnes telles que vous les dessert Vaclav Havel à Liu Xiaobo
Avatar de l’utilisateur
mandarine
 
Messages: 1848
Inscrit le: 08 Juil 2011, 21:44
Localisation: reims

un festival de lanternes

Messagepar laoshi » 05 Fév 2012, 16:04

Merci pour ces superbes images, Mandarine, je suppose que la vendeuse vous parle justement des devinettes qui sont inscrites sur les lanternes. Si j'en ai l'occasion, je demanderai à ma petite correspondante....
laoshi
Avatar de l’utilisateur
laoshi
Administrateur
 
Messages: 3912
Inscrit le: 06 Juil 2011, 06:23

Suivant

Retour vers les grandes fêtes chinoises

Qui est en ligne ?

Utilisateur(s) parcourant ce forum : Aucun utilisateur inscrit and 2 invités

cron