Demain, ce sera, comme chaque année, la journée internationale de « la » femme, en Chine comme ailleurs.
Pour le peu que je puisse en juger (je ne connais guère la Chine que par la littérature, le cinéma et la télévision), le machisme a encore de beau jour devant lui en Chine.
J'en veux pour preuve les modèles véhiculés tant par la littérature (y compris la meilleure) que par les feuilletons, source inépuisable pour qui veut découvrir ou recenser les modèles idéologiques dominants dans l'opinion (modèles qui sont sans doute questionnés par les élites culturelles mais modèles très prégnants chez "les masses"). Comptez les héroïnes qui sacrifient leur vie à l'homme de leur vie ou tout simplement à leur époux. C'est l'un des lieux communs de la littérature classique (bien analysés dans Le Pavillon des Pivoines, de Lisa See), c'est aussi un des lieux communs des fictions contemporaines.
Si j'en crois les feuilletons que je regarde régulièrement sur CCTV (et bien qu'il ne soit pas question, évidemment, de les prendre pour argent comptant), il y aurait en effet fort à faire en Chine pour la libération des femmes !
Pour le moment, je n'ai jamais vu un homme y prendre un balai ou y faire la vaisselle (par contre, ils font souvent la cuisine, ce qui est déjà un bon point). Les femmes, quel que soit leur milieu, y font la double journée sans état d'âme, au service de leur mari, de leur frère et, maintenant, de l'enfant-roi ! Les brus y sont sous la tutelle de toute la famille du mari, sommées de faire passer le souci de la lignée avant leur carrière ou leurs études, préposées à la reproduction d'un héritier - mâle, bien entendu ! Elles peuvent encore se sentir heureuses en cas d'accouchement périlleux quand, entre la mère et l'enfant, la famille choisit la mère.... Et quand les familles ont deux enfants (une fille et un garçon), la fille passe à l'arrière-plan, derrière la belle-fille qui assurera la continuation de la lignée ! Les mères et les grands-mères, bien sûr, sont dans l'adoration de leur fils ou petit-fils ; les jeunes femmes sont pratiquement toutes des femmes-enfants, superficielles, dépensières et capricieuses ; quant aux épouses, ce sont d'épouvantables viragos qui tyrannisent des maris inexistants et soumis condamnés à fumer leurs cigarettes clandestines dans les toilettes ! Car si les hommes que l'on voit dans les feuilletons sont en effet beaucoup moins machos, en apparence, que ceux que nous pouvons côtoyer tous les jours, ce sont aussi des êtres inconsistants, en butte à des criailleries sans fin, littéralement émasculés par des épouses dominatrices (même si celles-ci « se tapent tout le boulot » pour le dire vulgairement). Et quand, par exception, les femmes veulent s'émanciper de la tutelle d'un mari tyrannique, on leur recommande de « se sacrifier », par exemple, au héros de la Révolution ou au militant exemplaire du Parti !
Ma jeune amie chinoise, actuellement en Master, me disait qu'il n'était pas bon, pour une femme, de faire des études trop longues car les hommes n'aiment pas épouser une femme plus diplômée qu'eux (mais cela me semble vrai aussi en Europe).
Seul avantage (revendiqué) de la condition féminine contemporaine : les femmes auraient, de plus en plus, avec le déséquilibre démographique lié au choix sélectif de l'embryon et à l'infanticide déguisé des petites filles, le choix de leur conjoint (on oublie évidemment que les parvenus aiment encore à se payer le luxe d'une concubine).
Bref, l'image des femmes est aussi calamiteuse dans les feuilletons chinois que la réalité qu'ils déforment mais qu'ils révèlent à leur manière....
laoshi